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PÉRICLÈS : un projet à 150 millions d’euros menace-t-il la transparence électorale en France ?

 Périclès : un projet à 150 millions d’euros menace-t-il la transparence électorale en France ?

 
En juillet 2024, une enquête de L’Humanité a révélé l’existence de Périclès, un projet ambitieux financé par le milliardaire Pierre-Édouard Stérin à hauteur de 150 millions d’euros sur dix ans
Ce plan, structuré comme un véritable business plan, vise à remodeler le paysage politique français en soutenant des partis comme le Rassemblement National (RN) et Les Républicains (LR), tout en promouvant des valeurs conservatrices et identitaires. Mais ce projet, financé via une holding belge, Graal Holding, soulève de sérieuses questions : respecte-t-il les lois françaises sur le financement politique ? Voici une analyse des zones d’ombre et un appel à la vigilance.

Un projet aux ambitions électorales claires

Périclès, présenté comme une SAS (société par actions simplifiée), est dirigé par Arnaud Rérolle, qui a confirmé lors d’une audition devant la commission d’enquête parlementaire sur les élections, le 6 mai 2025, que le projet est financé par Stérin via Graal Holding (source X). L’objectif ? Influencer les élections à venir, notamment les municipales 2026 (avec un objectif de 1 000 mairies, dont 300 pour le RN) et la présidentielle 2027.
 
Le projet repose sur deux piliers :
  • Actions électorales : Formation de candidats via la plateforme Politicae, conseil opérationnel au RN, et mise à disposition d’outils pour les campagnes (L’Humanité, 29 juillet 2024).
  • Actions métapolitiques : Financement de médias (Néo, Factuel, Le Crayon), think tanks (Hexagone), et actions juridiques comme Justitia, une « guérilla juridique » contre l’islamisme et l’immigration (Médiapart, 30 juillet 2024).
Mais ces ambitions se heurtent à un cadre légal strict en France, qui encadre le financement des partis et campagnes pour garantir la transparence et l’équité démocratique.

Des financements problématiques au regard de la loi

Le financement de Périclès par Graal Holding, une holding belge, et les activités du projet posent plusieurs problèmes vis-à-vis des lois françaises. Voici les points critiques :
  1. Financement par une personne morale étrangère
    La loi n° 95-65 du 19 janvier 1995 et les articles L.52-3 à L.52-17 du Code électoral interdisent aux personnes morales, comme Graal Holding, de financer des partis ou campagnes électorales, sauf s’il s’agit d’autres partis. Or, le soutien à des candidats via Politicae ou la mise à disposition de ressources pour des campagnes pourrait être considéré comme un don illégal (Légifrance, Code électoral).
  2. Financement par un non-résident
    Selon l’article L.52-8 du Code électoral, seuls les individus de nationalité française ou résidant en France peuvent faire des dons politiques. Stérin, exilé fiscal en Belgique, est donc interdit de financer des partis ou candidats. Si Graal Holding injecte des fonds dans des activités électorales, cela violerait cette règle (Le Monde, 31 juillet 2024).
  3. Dépassement des plafonds de dons
    La loi n° 88-227 du 11 mars 1988 et la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 limitent les dons d’une personne physique à 7 500 € par an, tous partis confondus. Avec un budget de 15 millions d’euros par an, Périclès excède largement ce plafond si une partie des fonds bénéficie à des partis ou candidats (Légifrance, loi n° 88-227).
  4. Opacité des financements
    La loi n° 88-227 impose une transparence stricte, avec des déclarations à la CNCCFP. L’utilisation d’une holding étrangère comme Graal Holding complique la traçabilité des fonds. De plus, l’absence initiale de Stérin et Rérolle à une convocation parlementaire le 23 avril 2025 a renforcé les soupçons d’opacité (source X).
  5. Risque d’ingérence électorale
    La loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 et les articles L.163-1 à L.163-10 du Code électoral protègent l’intégrité des élections. Les actions de Périclès, comme le financement de sondages biaisés (ex. : Ifop pour Hexagone, mai 2025) ou de médias orientés, pourraient être vues comme des tentatives de manipulation du débat démocratique (source X).
Pourquoi cela nous concerne tous
Périclès ne se contente pas de financer des idées : il cherche à structurer le débat public et à influencer les urnes. En soutenant des médias, des think tanks, et des candidats alignés sur l’extrême droite, ce projet teste les limites de notre démocratie. La proximité de Stérin avec le RN, via son bras droit François Durvye, conseiller économique de Marine Le Pen, accentue ces inquiétudes (Médiapart, 30 juillet 2024).
La commission d’enquête sur l’organisation des élections, portée par le député Antoine Léaument (LFI), est actuellement en première ligne pour faire la lumière sur ces pratiques. Antoine Léaument, rapporteur de la commission, a déjà interrogé Rérolle et souligné les risques d’ingérence (source X). Mais pour que cette enquête aboutisse, elle a besoin d’un soutien citoyen.

Que faire ?

La transparence électorale est un pilier de la démocratie. Voici comment agir :
  • Soutenir la commission d’enquête : Contactez Antoine Léaument (antoine.leaument@assemblee-nationale.fr) ou l’Assemblée nationale (126, rue de l’Université, 75355 Paris 07 SP) pour demander une investigation approfondie sur Périclès.
  • Exiger des comptes : La CNCCFP (139, rue de Bercy, 75012 Paris) doit vérifier les comptes des partis bénéficiaires (RN, LR) pour détecter des dons illégaux.
  • Sensibiliser : Partagez cette note et les sources citées pour alerter sur les risques de dérives financières dans nos élections.

Périclès illustre un défi majeur : comment protéger notre démocratie face à l’influence des grandes fortunes, surtout lorsqu’elles opèrent depuis l’étranger ? La commission d’enquête d’Antoine Léaument est une opportunité pour poser des garde-fous. Ne laissons pas 150 millions d’euros dicter l’avenir de nos urnes.

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