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On a lu "La Meute"...

On a lu La Meute : quand l’acharnement remplace l’enquête


Paru chez Flammarion, La Meute de Charlotte Belaïch et Olivier Pérou prétend disséquer le fonctionnement de La France insoumise (LFI) et le comportement de son fondateur, Jean-Luc Mélenchon. 

Mais derrière une enquête qui se prétend sérieuse, se cache une entreprise de démolition, juridiquement bancale, politiquement orientée, et dangereusement alignée sur un climat d'hostilité généralisée contre la principale force de gauche du pays.

Une “enquête” qui flirte avec la diffamation

La Meute accumule des accusations extrêmement graves : harcèlement, emprise mentale, purges politiques, violences sexistes, propos antisémites, financement occulte. 

Problème majeur : ces allégations sont la plupart du temps anonymes, non sourcées, non étayées par des éléments matériels ou judiciaires.

Selon l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, la diffamation est définie comme :
 “toute allégation ou imputation d’un fait précis portant atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé”.

Et selon l’article 32, lorsque cette diffamation vise des élus ou agents publics dans l’exercice de leur fonction, elle est punie d'une amende de 45 000 euros. 

Même l’anonymisation des sources n’exonère pas les auteurs, si la personne visée est identifiable par sa fonction, ses relations ou des indices clairs.

Des passages de La Meute pourraient tomber sous le coup de cette loi, notamment ceux qui évoquent des faits de violences sexuelles, des propos antisémites ou des manipulations psychologiques graves, sans preuve ni procédure connue.

Le climat délétère : menaces, amalgames et point Godwin

La parution du livre n’est pas un fait isolé, mais un maillon d’une chaîne médiatique bien huilée. Pire encore, la promotion de cet ouvrage déchaine la haine et les pires outrages sur les plateaux de télévision. 

Lors de la promotion de l’ouvrage sur BFMTV, le 8 Mai 2025, Armand Jakubowicz a comparé Jean-Luc Mélenchon à Goebbels  et les Insoumis à des nazis. Une ligne rouge est franchie. Et pourtant, aucun recadrage, aucune mise en garde de la part de la journaliste présente sur le plateau. Une absence de réaction qui interroge, au-delà de la morale, le droit.

En effet, selon la Charte d’éthique professionnelle des journalistes (SNJ), tout journaliste a l’obligation de refuser «la diffusion d’informations falsifiées » et de corriger « toute assertion inexacte ». Laisser passer une accusation aussi grave sans remise en cause constitue une faute déontologique manifeste.

Mais la responsabilité ne s’arrête pas là. En vertu de la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881, la chaîne de télévision engage également sa responsabilité pénale. L’article 29 définit la diffamation comme toute allégation portant atteinte à l’honneur. L’article 31 aggrave cette qualification lorsqu’elle vise un élu ou un groupe en raison de ses opinions politiques. Enfin, selon l’article 42, le directeur de la publication, le journaliste et la chaîne peuvent tous être tenus pour responsables.

La jurisprudence est claire. En 2015, la Cour de cassation (Cass. crim., 17 mars 2015, n°14-81.612) a estimé qu’un présentateur qui ne recadre pas une déclaration manifestement diffamatoire peut être poursuivi. En 2000, le TGI de Paris a condamné la chaîne Arte pour avoir laissé passer sans réaction des propos incitant à la haine (TGI Paris, 11 octobre 2000). Et dès 1993, la cour d’appel de Paris considérait déjà qu’assimiler un homme politique à un criminel nazi relevait de la diffamation aggravée (CA Paris, 24 février 1993, Rocard c. Le Monde).

Autrement dit, face à de telles dérives, le silence journalistique devient complice

Et potentiellement condamnable.

Le droit est clair : le direct n’est pas un blanc-seing. Quand un invité commet l’inacceptable, le rôle d’un journaliste n’est pas d’enchaîner mollement sur un "Merci Monsieur Jakubowicz"


Ce genre de séquence, aux relents nauséabonds, contribue à légitimer un climat de haine contre les figures de La France insoumise. On ne débat plus, on diabolise. 

On ne confronte plus les idées, on pathologise les opposants.

Et ce climat ne s’arrête pas aux plateaux télé.


Des élus sous menaces permanentes

Depuis 2022, de nombreux députés et militants insoumis ont reçu des menaces de mort, d'agression ou de viol. Le député Thomas Portes a été spécifiquement visé par des menaces racistes et des appels au meurtre après avoir dénoncé les violences policières. 

Il n’est pas un cas isolé :

  1. En novembre 2023, plusieurs parlementaires LFI reçoivent des lettres contenant des balles ou des menaces écrites.
  2. La maison d'un militant insoumis a été incendiée dans les Vosges.
  3. Des conférences de députés insoumis sont violemment attaquées par des militants de l'extrême droite.
  4. Des militants sont insultés, agressés lors de tractages, ou fichés dans des publications d’extrême droite.
  5. La maison de Jean-Luc Mélenchon a été vandalisée.
Et pendant ce temps, les auteurs de livres à charge, de chroniques assassines ou de procès d’intention médiatiques s’autorisent tout, sans jamais avoir à se justifier ni rendre de comptes.

On parle ici du premier parti de gauche du pays, celui qui a permis à la NUPES et au NFP d'exister, celui qui est la seule véritable force d’opposition à Emmanuel Macron à l’Assemblée nationale. 

Et pourtant, il est traité comme un danger, des plateaux télé aux ministères.

Des politiques aux mains sales menacent même de demander la dissolution de la France insoumise. Quelle indignité ! 

Une stratégie d’étouffement démocratique ?

Le danger, aujourd’hui, ne vient pas de la radicalité insoumise. Il vient de la volonté systématique de l’écraser. 

Ce climat de diabolisation, renforcé par des ouvrages comme La Meute, prépare le terrain à une interdiction symbolique de parole publique pour toute gauche de rupture. 

La diabolisation de La France insoumise n’est plus un accident médiatique : c’est une stratégie politique devenue ligne éditoriale. Depuis des mois, le mouvement de Jean-Luc Mélenchon est systématiquement caricaturé en repoussoir absolu, amalgamé à l’extrême gauche violente, au complotisme, voire à l’antisémitisme — sans jamais que ces accusations soient sérieusement étayées. Pendant ce temps, les appels à l’ordre républicain tournent à la censure politique. Un rapport de l’INA (juin 2022) pointait déjà une surreprésentation négative de LFI dans les médias lors des élections législatives, tandis que des figures macronistes et lepénistes venaient librement saturer l’espace de leurs procès d’intention, sans contradiction.

En octobre 2023, Mediapart démontrait, analyses à l’appui, que les accusations d’antisémitisme contre LFI relevaient plus du réflexe pavlovien que du fait avéré. Pire : dès qu’un Insoumis prend la parole sur Gaza, la police, ou la laïcité, il devient la cible d’une mise en scène accusatoire où les mots “ennemis de la République” et “complices du terrorisme” sont lâchés sans scrupule — ni vérification.

Ce traitement à deux vitesses ne vise pas seulement à affaiblir un adversaire politique : il contribue à criminaliser l’opposition et à dresser un cordon sanitaire fictif autour de la gauche combative. Pendant que les affaires de l’extrême centre sont tues ou relativisées, les propos des Insoumis sont disséqués, déformés, condamnés en boucle. 

Le pluralisme démocratique se réduit à peau de chagrin quand le débat devient une chasse aux sorcières.

Faire taire les voix insoumises, c’est piétiner la liberté d’expression, celle qui protège les paroles dissidentes, les colères sociales, les refus d’un système à bout de souffle.

Un livre révélateur, mais pas pour les raisons annoncées
La Meute ne nous apprend rien sur La France insoumise. Elle confirme surtout que l’obsession des médias dominants n’est plus de comprendre, mais d’abattre. 

Ce n’est pas une enquête : c’est un instrument de guerre politique.

La violence qu’on reproche à LFI est celle que les institutions médiatiques et politiques exercent aujourd’hui, méthodiquement, contre elle.

Cet ouvrage s'inscrit dans un climat de harcèlement politique organisé autour d’un mouvement populaire. 

Il est à déconstruire, ligne par ligne, car derrière l’enquête prétendue, c’est une entreprise de dénigrement avancée, qui élargit encore, si cela était possible, la fenêtre d'overton. 


Quelques sources :

  • https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/etude-legislatives-2022 
  • https://lcp.fr/actualites/la-france-insoumise-alerte-sur-une-multiplication-des-menaces-de-mort-visant-des-elus-et
  • https://www.tf1info.fr/politique/guerre-israel-hamas-les-elus-de-la-france-insoumise-lfi-harceles-et-menaces-de-morts-alerte-le-parti-2273514.html 
  • https://linsoumission.fr/2023/09/12/maison-lfi-incendiee-solidarite/ 
  • https://lafranceinsoumise.fr/2025/01/14/menaces-de-mort-contre-lfi-jusquou-jusqua-quand/ 
  • https://www.mediapart.fr/journal/france/161023/le-discours-de-diabolisation-de-la-france-insoumise-pris-en-faits 
  • https://www.humanite.fr/politique/extreme-droite/des-fascistes-armes-attaquent-une-conference-de-la-france-insoumise-a-bordeaux-774068 
  • https://france3-regions.francetvinfo.fr/paris-ile-de-france/seine-saint-denis/menace-de-decapitation-le-depute-lfi-thomas-portes-demande-une-protection-policiere-immediate-3147530.html 
  • https://www.20minutes.fr/societe/4129903-20241218-jean-luc-melenchon-trouver-insoumis-raconte-profanation-maison-secondaire 
  • https://lafranceinsoumise.fr/2021/09/18/fichage-de-militants-par-lextreme-droite-le-gouvernement-doit-agir/ 
  • https://www.ouest-france.fr/politique/la-france-insoumise/menaces-de-mort-par-un-ecrivain-franco-israelien-des-deputes-de-la-france-insoumise-portent-plainte-5cb6fdfa-f5bc-11ef-949f-63632bc5ac37 
  • https://www.facebook.com/JLMelenchon/photos/je-porte-plainte-contre-le-pr%C3%A9sident-de-la-licra-ligue-internationale-contre-le-/1359542832197768/?_rdr 
  • https://x.com/JLMelenchon/status/1920507813144489996



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